Raphaël Blanchard, un infatigable chercheur, pionnier de la parasitologie

Le deuxième illustre médecin en l’honneur de qui a été élevé un monument devant la mairie de Saint Christophe est Raphaël Blanchard, celui qui représentait l’Académie de médecine lors de l’inauguration du monument de Fulgence Raymond, en 1913.

Blanchard naquit le 28 février 1857, au 11 de la Rue Chaude actuelle, dans une maison qui existe toujours. Il était le fils de René, Marie Blanchard et de Olympe, Antoinette Mançais. Son père était employé du ministère des finances et poète dramatique à ses heures, pas très connu, sans doute, mais assez poète pourtant pour que son fils ait hérité de lui le goût des lettres et l’amour des belles rimes. Il était aussi l’arrière-petit-neveu de Jean-Pierre Blanchard qui inventa le parachute et fit, avec Jefferies, en 1785, la première traversée de la Manche en ballon.

 

Actuellement, la façade de cette maison s’orne de deux plaques de marbre pour rappeler aux passants que c’est là que virent le jour Raphaël Blanchard et un oncle maternel, Antoine Mançais, qui s’orienta vers la médecine militaire, montrant la voie à son neveu.

Le jeune Blanchard fit ses études primaires à l’école de St Christophe, tout comme Fulgence Raymond. Ils eurent le même maître ; mais Raymond avait déjà quitté cette école quand Blanchard y entra, car il était treize ans plus jeune.

C’est dans le jardin de son grand-père, tout plein de fleurs et de fruits et situé tout près de l’école, que le jeune garçon, vivement intrigué par le spectacle de cette nature luxuriante,  prit goût aux sciences naturelles. C’est aussi dans ce jardin, voisin de la propriété des Raymond, qu’il entendit, bien des fois, le père de Fulgence parler des progrès et réussites de son fils et cela lui donna envie de l’imiter.

Après ses études classiques, à 17 ans, il commence des études médicales à la Faculté de Paris en octobre 1874 où il retrouve Fulgence Raymond qui débute sa brillante carrière médicale.

Il s’intéressa très tôt aux sciences naturelles puisque dès 1876 il était attaché au laboratoire de zoologie à l’École des Hautes-Études. Malgré son jeune âge, il participa à la séance inaugurale de la Société zoologique de France le 8 juin 1876, en tant que membre fondateur.

En 1877, une bourse de voyages lui est décernée par le Conseil municipal de Paris, elle lui permet de fréquenter, pendant un an, les universités de Vienne, Leipzig, Berlin et Bonn.

En 1880, il obtient une nouvelle bourse avec mission spéciale d’étudier les sciences biologiques et l’organisation des universités à l’étranger ; il voyage ainsi en Allemagne, Russie, Finlande, Suède, Norvège et Danemark. Cette même année, il obtient son diplôme de docteur en médecine. En 1882, il est licencié ès sciences naturelles et l’année suivante, agrégé d’histoire naturelle, il n’a que 26 ans et devient ainsi le plus jeune agrégé de la Faculté de médecine de Paris.

Pendant cette période, il devient, tour à tour, préparateur de Paul Bert, répétiteur du cours de physiologie générale à l’Institut national agronomique et professeur d’histoire naturelle au lycée Louis le grand, puis à Saint-Louis jusqu’en 1884.

De 1894 à 1900, il est professeur à la Faculté de médecine.

Le professeur Guiart écrit à propos de son enseignement : " Raphaël Blanchard entre résolument dans une voie révolutionnaire et, éloignant de son programme tout ce qui ne peut être utile aux futurs médecins, il spécialise son enseignement et parle surtout des animaux venimeux ou nuisibles à l’homme en insistant plus particulièrement sur les parasites et sur les maladies qu’ils déterminent".

Le professeur Delorme ajoute : " Tandis que la chaire d’histoire naturelle à la Faculté de médecine de Paris ne s’attachait qu’à l’étude très accessoire de la botanique pure et que cet enseignement trouvait un amphithéâtre vide, Blanchard y amène les élèves par centaines en s’attachant à celui, plus utile, parce que plus médical, de la parasitologie". 

En 1889, il est secrétaire général du 1ier Congrès international de zoologie qui se tient à Paris à l’occasion de l’Exposition universelle.

 

Blanchard fut un des grands animateurs de la zoologie française de la fin du 19e siècle et, de 1879 à 1900, il demeura secrétaire général de la Société zoologique de France et publia de nombreux travaux dans le bulletin et les mémoires de cette société. Il se spécialisa dans l’étude des sangsues, des diptères parasites. On lui doit en outre un volume de 673 pages intitulé : « Les moustiques, histoire naturelle et médicale ». Il fit aussi diverses recherches sur les animaux les plus variés : protozoaires, mollusques, vers parasites, acariens, myriapodes, insectes et même crocodiles.

Tous ces travaux valurent à Blanchard la vice-présidence des deuxième et cinquième Congrès internationaux de zoologie qui se tinrent respectivement à Moscou et à Berlin. Il était un extraordinaire polyglotte : à Moscou en 1892 il remercia en russe les organisateurs, tandis qu’à Berlin en 1901, il dirigea tous les débats en allemand et prononça dans cette langue le discours de clôture. Notons qu’il parlait aussi couramment l’anglais, l’italien et l’espagnol.

En 1894, à 37 ans, il est élu à l’Académie de médecine, puis le 25 juillet 1897, il est nommé professeur d’histoire naturelle médicale à la Faculté de médecine de Paris, sa chaire sera transformée en chaire de parasitologie en 1905.

Dès 1898, il fonde les Archives de parasitologie et, en 1902, l’Institut de médecine coloniale de la Faculté de médecine de Paris.

La même année, le 29 janvier, Blanchard dont la curiosité était inépuisable fonde, avec quelques collègues, la Société française d’histoire de la médecine.

Notons encore que cet infatigable chercheur s’est occupé de physiologie, d’anatomie pathologique et de tératologie ; mais il faut remarquer que la médecine clinique occupe dans son œuvre une place très réduite, car il était avant tout un naturaliste.

Il publia un nombre considérable d’écrits (environ 500 publications) d’importance inégale, parfois pittoresque comme « Les manifestations dermiques de la goutte chez une perruche » ; mais d’autres ouvrages comme son « Traité de zoologie médicale » ou son livre sur les moustiques qui représentèrent, à leur époque, des travaux considérables et d’une grande portée. Il est de ce fait légitime de le considérer comme un des pionniers français de la parasitologie et de la zoologie médicale.

 

Il avait un grand amour pour les honneurs et distinctions. On en relève, en effet, pas moins de 160 dans ses notices de titres, allant de « Membre à vie de la Société française de numismatique et d’archéologie » à « Grand officier de l’Ordre de Danilo 1ier du Monténégro », sans oublier cependant qu’il devint aussi « Officier d’Académie » en 1888 et « Officier de la Légion d’honneur » en 1912 ; mais aussi « Officier de l’Instruction publique et du Mérite agricole ».

L’homme tel qu’il apparaissait à  ceux qui l’ont connu était grand et vigoureux avec une figure mâle et énergique, il avait une très grande distinction tant dans sa tenue vestimentaire (parfois il poussait la coquetterie jusqu’à faire son cours avec une fleur à la boutonnière) que dans son élocution qui faisait de lui un orateur et un conférencier de grande classe.

Blanchard avait une personnalité extrêmement attachante et une très grande culture générale qui faisaient de lui un véritable humaniste doublé d’un naturaliste de valeur.

Il disparut subitement le 7 février 1919, en pleine activité, comme il le désirait, sans connaître les souffrances physiques et morales de la vieillesse ; il allait avoir 62 ans quelques jours plus tard. Sa mort fut causée par une complication cardiaque de la grippe. Il fut inhumé dans le caveau familial du cimetière de Saint Christophe (ce tombeau existe toujours).

Il était veuf en premières noces de Louise Chancel et il venait, le 4 novembre 1918, d’épouser en secondes noces Hélène Zaborowski, artiste peintre, de 32 ans sa cadette.

En 1922, cette artiste peignit et offrit à la commune le "tableau des enfants de Saint Christophe morts pour la patrie" qui se trouve toujours à gauche en entrant à la mairie.

La commune de Saint Christophe se devait d’honorer Raphaël Blanchard comme elle l’avait fait, peu de temps auparavant, pour son illustre prédécesseur Fulgence Raymond. C’est ainsi qu’elle accepta d’élever un deuxième monument devant la mairie, en faisant une nouvelle fois appel au sculpteur Bigot pour façonner le buste de bronze ; tous les frais étant pris en charge par la veuve du professeur.

Ce monument fut inauguré le 6 juillet 1924 en présence de Mme Blanchard et de très nombreuses personnalités politiques et médicales.

Le jour de l'inauguration, les personnalités entourent Mme Blanchard
Le jour de l'inauguration, les personnalités entourent Mme Blanchard
Les personnalités devant la mairie
Les personnalités devant la mairie